vendredi 29 août 2008


Je ne pense pas que l'ete soit la meilleure periode du ciel pour lire Virginia Woolf, cela equivaut a manger du cassoulet sous une chaleur ecrasante, il y a des ecrivains-chocolat-chaud et les autres, les ecrivains-sorbet, je concois et visualise tres bien les premiers, un peu moins ces derniers.
Virginia Woolf, sans la connaitre j'avais le visage meconnaissable de Nicole Kidman dans The Hours, la vision d'une femme dans une longue robe molle posee comme une cape sur sa silhouette cassee par les heures d'ecriture et la lucidite, quelque chose qui se lit idealement dans une maison de repos a l'heure de la promenade, les fesses sur un banc, le plaid sur les genoux, les feuilles qui tombent des mains des arbres, les cheveux qui tombent de la tete par poignees inquietantes, un peu comme celles qu'on trouve en suspension au fond des piscines.
Et puis finalement un bon ecrivain se mange a toutes les periodes de l'annee, dans n'importe quelles positions et dans n'importe quelles tenues. (vision d'Emile qui me tend ''le petit nicolas a des ennuis'' en me disant ''tiens, mange'')
Pendant ses vacances il y a eu d'abord la lecture de Mrs Dalloway, monologue interne sans interruption qui saute de personnages en personnages, et de l'essai d''Une chambre a soi'' qui parle des femmes et du roman et de toutes les questions qui peuvent contenir ces deux mots, elle tente de comprendre les raisons d'une litterature feminine quasi inexistante pendant des siecles et explique que selon elle les conditions sine qua non a la redaction d'une oeuvre litteraire se trouve etre de quoi vivre, du temps et une chambre a soi. C'est tres agreable a raconter, encore plus a lire, c'est delicieux comme une boite de patisseries libanaises, on se promet de pouvoir arreter a tel niveau de la boite, a tel chapitre du livre, et on continue jusqu'a qu'il n'en reste plus rien.

Bon bien sur durant ces vacances il n'a pas ete que question de Virginia Woolf mais aussi de deux trois autres romans, de tele, de DVD, de bronzage, de famille, de quelques tranches manuscrites et d'un kilo en plus. Tellement de non-evenements se sont enchaines qu'a ce stade il faudrait faire un resume du resume. Je reviens dimanche, il etait temps, le clavier qwerty et TF1 qui bugue a l'heure de la quotidienne de Secret Story commencaient a serieusement m'irriter.
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''Des chiens aboient, des gens viennent interrompre le travail; il faut gagner de l'argent; la sante s'altere. De plus l'indifference bien connue du monde aggrave les difficultes et les rend plus penibles. Le monde ne demande pas aux gens d'ecrire des poemes, des romans ou des histoires; il n'a aucun besoin de ces choses. Peu lui importe que Flaubert trouve le mot juste ou que Carlyle verifie scrupuleusement tel ou tel evenement. Et, bien entendu, il ne paye point ce dont il n'a cure. C'est pourquoi l'ecrivain, qu'il soit Keats, Flaubert ou Carlyle, est atteint de toutes les formes de desequilibre et de decouragement, et cela surtout pendant les annees fecondes de la jeunesse. Une malediction, un cri de douleur s'eleve de leurs livres d'analyses et de confession. ''Grands poetes morts dans la misere'', tel est le refrain de leur chant. Si, en depit de toutes ces difficultes, quelque chose nait, c'est miracle; et sans doute aucun livre ne vient-il au jour aussi pur et aussi acheve qu'il fut concu.''

Virginia Woolf - Une chambre a soi

pardon pour tout ce francais sans accent, promis je recommencerai pas

XTC - Making plans for Nigel



mardi 19 août 2008

on peut dire ce qu'on veut, on peut lire le contraire sur le tube : la creme solaire ne resiste pas a l'eau.

lundi 11 août 2008

le départ approche, plus que trois heures, et ça me rend un peu triste, à chaque fois que je vais au Liban je suis triste, il n'y aura pas ma soeur alors que j'ai toujours passé mes vacances au liban avec elle, je me lasse vite de la piscine et du transat mais quand elle est là je peux rester deux heures les bras croisés contre le rebord de la piscine à parler de ces amis (je les connais tous), de ce qu'on portera cet hiver, de nos cousins et des filles qui passent pieds nus devant nous.
C'est aussi elle qui se charge de faire la discussion avec les membres de ma famille, moi je n'ai jamais rien à leur dire, ils savent comment je suis, "tu préfères la france hein", je suis celle qui reste à l'hôtel, qui ne va pas passer la journée chez les cousines de ma mère, "elle est où Murielle?" sur un ton plaintif.

20 jours sans ma soeur pour debriefer les journées, pour parler sur les cousins, pour regarder inlassablement les mêmes clips sur mtv et qui finissent par constituer notre bande-son de l'été,
l'année dernière ça donnait :
Red hot chili Peppers - Hump de Bump meilleure chanson du monde
20 seconds to mars - From Yesterday clip qui nous fascinait plus qu'autre chose
The Editors - Smokers outside the hospital doors j'en ai encore des frissons
Joss Stone - Tell me what were gonna do now
Kelis - Little Star
Mark Ronson - Stop me reprise des Smiths

On regardait chaque clip au moins 5 fois par jour, le matin, puis le soir, on finissait par avoir nos passages préférés, vers la fin des vacances on a même établi une liste exhaustive des clips vus, il y en avait une trentaine. Après ces vacances je n'ai plus jamais réécouté ces chansons en dehors d'aujourd'hui.
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deux jours après avoir lu une nouvelle de raymond carver sur un homme qui pète un câble parce que son oreille est bouchée je me lève ce matin avec l'oreille droite : bouchée. Ca ne m'est jamais arrivé de toute ma vie et j'y vois là la preuve que nos lectures influent beaucoup plus qu'on ne le pense sur nos vies et notre état physique, si là l'influence est flagrante je sais qu'elle peut être beaucoup plus dissimulée, à l'avenir je veillerai à être plus attentive.

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Un homme dans le bus, il parle tout seul, ça peut arriver. j'arrive à comprendre "france de merde", puis plus fort et très distinctement, cette fois-ci contre un homme qui lui a répondu "et des merdes comme ça, ça représente la France...putain de sa race...", et au moment de descendre, c'est autre chose, il crie, hors de lui, "MOI MONSIEUR, J'AIME MON PAYS ET J'EN AI MARRE QU'IL SOIT ENVAHI, VOILA C'EST TOUT". Courbevoie, ville lumière.

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le clip d'Arthur H à la télé, immonde, je pense à une critique de l'album, "l'univers totalement barré d'Arthur H"
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je pars donc au Liban 20 jours, je reviens le 31, parfois j'aurai internet, petit bisou à tous.

dimanche 10 août 2008

j'ai revu T., il m'a rendu Novovision, au café, derrière lui il y avait un écran qui diffusait la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques, il faisait nuit chez eux, j'étais seule avec lui dans le café, ça m'a fait une drôle d'impression cette cérémonie, la terre tournée vers ce stade, mon coup d'oeil distrait, je me sentais liée à tout ce qui se passait là-bas, le sentiment un peu ridicule d'être citoyenne du monde, d'une histoire collective, même si je déteste le sport et ce défilé de playmobil en bonne santé, ce sentiment ne me quitte pas.

Un peu plus tard, en fait vers 3 heures du matin, rediffusion de la cérémonie, tout les pays passent, c'est long et sans grand intérêt, je crois qu'il n'y a pas le Liban, ou peut-être que si, ils sont très forts en basket, trois pays seulement ont des sportifs pour la totalité des sports : Russie, Chine, Etats-Unis, quand s'est à leur tour de défiler leurs équipes s'étendent presque sur le tour de stade entier, alors que certains pays d'Afrique n'ont que 6 sportifs tout mignons en costume traditionnel.
J'aimerais changer de chaîne mais myriam s'est une fois de plus endormie avec la télécommande, elle m'a demandé de la réveiller au moment où la Suisse passait, elle veut voir Federer, je lui ai dit qu'elle va s'énerver si je la réveille, elle n'a pas insisté.
Au moment où la Suisse passe je dis un peu fort "myriam, myriam", je me penche un peu pour tirer sur sa couverture. j'aurai au moins essayé. Le lendemain on est dans nos lits, on vient juste d'ouvrir nos yeux, je lui dis "j'ai essayé de te réveiller" "il était là?" "ouais il était même porte-drapeau". Il n'agitait même pas le drapeau, juste il le tenait, peut-être que ça faisait trop patriote à son goût et qu'il n'avait pas besoin de ça pour se faire remarquer de tous.
tranche datant du 6 août

On est resté tellement longtemps chez l'opticien que le mec qui s'occupait de nous nous a offert le café, il nous a demandé à ma mère et à moi si on voulait boire quelque chose "thé ou café?" ma mère a dit "un café", "et mademoiselle?" ma mère a répondu pour moi "rien", je me suis retournée, trois paires de lunettes entre les doigts, comme si je tenais des flûtes à champagne, je l'ai vite repris, choquée, "un café s'il vous plaît", "ah bon un café alors". pendant qu'il préparait le café j'ai dit à ma mère "j'ai mon canderel dans mon sac", j'étais assez contente de moi, elle aussi.

j'essayais les lunettes de soleil, je commençais à saturer, à ne plus distinguer les différences entre chaque paire, c'était toujours le même écran hautain et noir. je voulais quelque chose de sobre avec des verres les plus sombres possibles, rien de trop à la mode, genre lunettes mouche, le café allait refroidir alors j'ai écourté la recherche, trop de choix, trop d'hésitations, et puis les strass sur les branches, les marques écrites en énorme et en doré et qui gâchaient tout, j'ai finalement opté pour des gucci toutes noires avec un simple G noir gravé sur les branches, pour la vue j'ai des calvin klein assez simples, plutôt rondes, monture noire, plus fines que mes wayfarer, le coin extérieur remonte un peu vers le haut, façon secrétaire 60's, ça me va.
En quittant l'opticien, soulagement dans la voix, je me souvenais avoir voulu retourner chez l'ophtalmo pour avoir des lentilles et que je me retrouvais encore avec des lunettes, l'ophtalmologue avait dit à ma mère de prendre rendez-vous le matin pour qu'elle me fasse porter des lentilles et puis que je revienne 3 heures plus tard pour voir si ça allait, j'avais trouvé ça trop chiant, ces 3 heures, je m'imaginais aller au cinéma. après il y a eu un malentendu, je n'ai pas bien compris si ma mère avait réellement pris rendez-vous, au téléphone elle hésitait entre deux jours avec la secrétaire puis en raccrochant elle ne m'avait rien dit, croyant que j'avais compris qu'un rendez-vous était fixé. on s'est un peu disputé sur ce point "mais je croyais que t'avais compris", "mais normalement quand j'ai un rendez-vous tu m'appelles le matin pour me réveiller", dans sa façon un peu légère de me gronder je comprenais que c'est elle qui avait tort et bien sûr ça ne sert à rien de lutter. il y a des personnes (pour ne pas dire tout le monde) qui n'avoueront jamais qu'ils ont tort, bon je ne vous apprends rien, mais vraiment, se battre avec eux, c'est éreintant, ça donne envie de suffoquer, parfois de pleurer, on a besoin de leur aveux.

le mec m'a donné les lunettes de soleil dans une très grande boîte, le fait qu'il me refile la paire d'exposition me choque toujours autant. Maintenant la mode est aux grosses lunettes avec des grosses branches et je sais pas si vous avez déjà vu mais les boîtiers sont de plus en plus énormes, des espèces de gros blocs encombrants, j'ai ça pour les miennes.

ensuite nous sommes allées chez darty voir un peu les lecteurs dvd portable pour moi, pour le voyage. on comparait les prix avec ceux de la fnac, j'ai mangé une pomme sur le trajet qui mène de l'opticien jusque chez darty, ça faisait longtemps que j'avais pas fait les magasins avec ma mère, elle marche plus lentement que moi et je devais toujours un peu m'arrêter pour qu'elle me rattrape. ça faisait aussi longtemps que j'avais pas mangé de pomme, je me souviens de cet automne que j'ai passé à manger des oranges, trois par jour, je m'en souviens parce qu'en même temps je parlais à gabriel sur internet et je lui disais "bon je vais manger une orange" ou alors "je mange une orange". francis ponge dit de bonnes choses sur l'orange, je taperai le passage cet hiver.

j'ai laissé ma mère au centre commercial, à 20 heures j'avais prévu d'aller voir "Belle de jour" au cinéma, c'était pour un festival au cinéma Le Latina, la première fois que j'y suis allée c'était avec Cécilia et Charlette pour "La Soledad", c'était le seul cinéma qui le diffusait encore, après j'avais dit à Cécilia "je reviendrai plus jamais là, la meuf de la caisse est trop méchante", puis finalement j'y suis retournée pour "mariage à l'italienne" et là pour "Belle de jour" qu'il rediffuse à l'occasion du festival qui se tient pendant les vacances. Toutes ces reprises d'anciens films pendant les vacances c'est tellement mais tellement agréable.
pendant que je faisais la queue une nana m'a demandé si je voulais remplir un questionnaire pour "mieux connaître les spectateurs du Latina", le monsieur devant moi à fait tomber sa malette, je la lui ai ramassée, je crois qu'il ne m'a pas dit merci. j'ai "acheté" ma place, je doutais depuis hier pour savoir si ma carte ugc allait être acceptée parce que dans le Pariscope il y avait écrit "Carte UGC Illimitée Acceptée sauf séances exceptionnelles", et je me demandais si les séances du festival faisaient parties des séances "exceptionnelles", bon ça a marché, j'étais contente. J'ai pris un crayon à papier dans mon sac et j'ai rempli le questionnaire le plus sincèrement possible.
le film était extraordinaire, ça m'a mise de bonne humeur et en sortant j'ai marché un peu dans cette ville désertée, c'était vraiment très émouvant, très apaisant, la tombée de la nuit, les oranges gourmands des lampes à sodium, les lettres du café "Sarah Bernhardt" tracées dans la nuit, le bac à sable vide devant les jardins éphémères de l'hôtel de ville, du monde devant la bouche de métro châtelet, la station est évacuée, ça m'incite à marcher encore, toujours sans limites, la solitude devient tranquillité, les couples sont mes complices, les touristes sont sages, je suis fascinée par les intérieurs des appartements allumés, je discerne des bureaux, des bibliothèques, beaucoup de tableaux accrochés au mur.
après saint-michel, les assiettes éclatées au pied des restaurants grecs.

vendredi 8 août 2008

quand je me lève tôt, je suis de bonne humeur, je suis capable de tout pour tout le monde, j'ai envie de faire des petit-déjeuners comme dans les films, avec des choses salées, des choses folles, mais personne n'en veut, quand je demande à ma soeur, encore à moitié endormie, moi sur mon lit, dans la robe de chambre, zélée, tentant de lui soutirer un "oui", elle me répond "nan ça va, chui au régime", il n'y a que Emile qui veut bien.

je lui fais deux oeufs au plat que je cuis séparément, l'un après l'autre sur la plaque à induction, et je les place sur deux tranches de pain de mie préalablement toastées sur le grille-pain le plus vieux du monde j'ai l'impression, j'essaye de faire en sorte que l'oeuf ne soit pas prêt avant le toast, j'ai demandé à Emile s'il voulait du jambon avec mais il a dit non.
deux choses me chagrinent un peu quand je lui prépare ses oeufs :
1) je suis toujours obligée d'écrabouiller en une bouillie bicolore l'oeuf au plat qui pour moi est un sommet de perfection (cette bulle jaune soleil si bien délimitée, ce blanc immaculé, comme les bonbons oeufs) pour que le toast en soit entièrement recouvert,
2) Emile aime réduire au maximum ses efforts et me demande de couper les tranches, à la fin ça ne ressemble plus à mon idée de petit-déjeuner de film, mais Emile est content et Myriam tente de déceler un moment d'inattention chez lui pour pouvoir lui chourrer un carré.
ensuite elle me regarde faire la vaisselle, frotter la poêle comme un bras qui démange et elle me dit "tu veux pas être mère au foyer?", à chaque fois elle me sort des choses comme ça, "tu veux pas rester à la maison et t'occuper de nous?" moi j'aimerais bien, j'aime ça, l'état un peu vague dans lequel me plonge le lavage d'une tasse ou d'une assiette, j'aime nettoyer, purifier des surfaces, le sol ou la table de la cuisine, le miroir de la salle de bains, la moquette, laver des abricots, cette obsession de la perfection qui naît en moi soudain, c'est dans ces conditions que le reste disparaît.

mercredi 6 août 2008


je me suis endormie vers 21h30 devant les rois mages sur tf1, je rigolais un peu, ensuite quand je décide d'enlever mes lunettes et de les poser sur ma table de chevet ça veut dire que je m'apprête à dormir, à tourner le dos à la télé, je pose ma joue sur le matelas, hop je dors.

à partir de minuit j'ai eu un sommeil agité, emile et myriam regardaient des épisodes de Scrubs sur dailymotion, il se disputait, le son était trop fort, j'avais chaud, je m'étais endormie avec mon kimono en soie rose, je l'ai enlevé, je l'ai balancé par terre, je me suis rendormie, j'ai fait des rêves, j'entendais emile et myriam.

à 2 heures réveil définitif, je me lave le visage, j'ouvre un livre (les vitamines du bonheur - raymond carver) emile et myriam regarde encore des épisodes, je leurs dit "vous pouviez quand même faire moins de bruit, moi aussi j'ai le droit de dormir, vous me traitez comme un chien, c'est pas parce que c'est moi...", ils s'en balacent de me réveiller, emile commençait à faire "ouaf ouaf" pour se moquer de moi, après on a un peu rigolé, ils ont arrêté Scrubs, on a regardé la rediffusion de secret story, emile avait mal au coeur, myriam lui a dit "faut pas que plus tard tu sois hypocondriaque", il disait "je sens mon coeur battre
- et alors?
- c'est peut-être une maladie
- t'es trop con, c'est parce que c'est la nuit que t'es comme ça, tu t'inquiètes."

je lui ai apporté une compote et un verre de lait, j'ai mangé un yaourt à la fraise, je lui ai dit

- le lait c'est rassurant hein
- ouais, ça rappelle le matin"

on a posé les verres et les pots de yaourts vides sur les tables de chevet, à 3 heures 30 les deux loustics dormaient, moi je lisais encore

"Il avait toujours une cafetière au chaud pour elle.
Elle s'asseyait dans le fauteuil du séjour, lui sur le canapé, et elle racontait sa journée. Ils tenaient leur tasse et buvaient leur café comme s'ils étaient des gens normaux, pensait Sandy."

J'ai lu la biographie de Raymond Carver, j'aime bien savoir à quel âge les écrivains meurent, j'aime bien quand c'est tragique, lui est mort à 50 ans d'un cancer, même si ça ajoutait à son écriture ça me rendait triste, il aurait encore pu écrire en 2008, à 70 ans, comme philip roth, j'ai cherché des photos de lui, j'ai été surprise par sa tête sympathique. j'ai encore lu, un moustique venait parfois jouer près de mon oreille, à la deuxième fois je me suis calfeutrée dans ma couverture, il ne restait plus que ma tête et ma main pour tenir le livre, j'ai lu sur le côté, dans mon cocon.

Vers 7 heures j'avais faim, j'ai mangé des biscottes, du beurre et de la confiture de fraise, un peu de céréales, un café, du lait, en écoutant la radio, c'était presque exactement l'heure à laquelle je déjeune habituellement, quand je vais au lycée, après je vois les copines à 8 heures, j'ai les yeux fatigués mais le regard amical. j'ai mis des tasses dans le lave-vaisselle, remplir le lave-vaisselle c'est un combat de tous les jours, c'est assez éreintant, le bac à couverts est toujours plein, celui des assiettes toujours vides, je prends cette lutte pour personnelle, c'est un défi, j'essaye de tous équilibrer : je lave les tasses et les couverts à la main et pas les assiettes.

Vers 8 heures ma mère se lève, je lui dis bon anniversaire et lui fait la bise, je ne lui ai rien acheté, je sais pas quoi lui offrir, elle a tout et moi de mon côté je manque d'argent, je vais lui acheter des fleurs et être gentille avec elle, ce soir on va au restaurant en tout cas. j'aime sa tête du matin quand elle ne se maquille pas, qu'elle n'a pas ses lentilles, elle fait 10 ans de moins, j'arrête pas de le lui dire mais elle est têtue.
elle me dit qu'elle m'a trouvé un haut chez promod, une sorte de débardeur gris, je l'essaye pendant qu'elle prend sa douche mais il ne me va pas, je le plie, je le mets sur la table du salon pour qu'elle le rende, je lui dis qu'il me va pas pour faire comme si j'y étais pour rien, que moi je l'aimais mais que ça ne suffit pas.
je lui demande si elle veut que je fasse les fournitures d'Emile aujourd'hui, elle me dit oui, elle me sort la liste, on va dans la chambre d'emile, on chuchote comme si on préparait quelque chose, "alors tu vois là y'a deux grands cahiers 24x32 grands carreaux qu'il a pas utilisé, donc tu les rayes, et des feutres on en a, des crayons de couleur aussi, et des feuilles simples et des copies doubles, là tu vois, on a que ça, on en a plein, t'en prends pas surtout"
je barre sur la feuille les choses que je ne dois pas prendre, elle me passe des bons virgin qui viennent du travail de mon père, "a ton avis 20 euros ça suffit?" ça m'a choqué, avant la rentrée ça dépassait largement 100€, là c'est 20€, tout mignon
"quoi? naan, au moins 30 quand même"

je me refais un café, je vais dans ma chambre, je le cache au cas où ma mère rentrerait, elle veut absolument pas que je boive autre part que dans la cuisine, depuis qu'on a déménagé elle me le dit et je l'ai jamais fait.

avant de partir elle me dit d'arroser les plantes "un litre pour chaque pot, prends une bouteille, je sais pas comment tu vas faire" au même moment j'étais en train de jeter la bouteille d'1,5L d'orangina light qui était dans mon sac, je l'ai nettoyé et j'ai arrosé les plantes, ma mère était déjà partie, le soleil tapait fort, le matin c'est comme si le soleil prenait la place du ciel et éclairait absolument tout, c'est le moment de la journée où il y a le plus d'espoir et de gaieté, il fait frais, on entend des travaux, on aime sa ville, quelle qu'elle soit. dans ma tête j'ai convenu d'un horaire pour sortir de chez moi, il faut que j'achète le nouveau pariscope et les fournitures et que j'aille voir l'expo china gold, c'était les objectifs que je me fixais. je pense sortir vers 13 heures. je me suis promis de me mettre à la rédaction de petites nouvelles, en lavant une tasse j'hésitais entre l'usage de la première et la troisième personne, je me suis dit "je ne sais pas inventer des histoires" tout en pensant que ça allait s'arranger avec le temps.

lundi 4 août 2008

je raisonne comme ça :
s'il faut payer un coca light 5 euros autant être le mieux placée possible et alors un seul endroit prévaut sur tout les autres : le centre pompidou et ses cafés alentours, la foule y est hétéroclite (je me lasse déjà de moi-même, de mes propos prévisibles) et dynamique, on peut s'y faire bousculer comme accoster et les cafés sont plantés là comme des rebords de piscine, on s'y raccroche avant de se noyer.

je redoutais l'arrivée du garçon de café, j'hésitais très sérieusement entre le cappucinno et le coca light, oh ça m'énervait, finalement j'ai choisi le coca light avec tout ces accessoires : citron, paille, glaçon, addition et j'ai commencé mes lectures.
Ce matin j'ai fini "Comme le feu mêlé d'aromates" de gabriel matzneff, que je vous conseille de tout mon coeur, un récit qui à certains passages prend des formes de manuel de savoir-vivre, tout ce que j'aime.
J'aime les écrivains qui vivent avec leur idée, une conviction intime et profonde qui régirait absolument toute leur vie, j'ai un besoin inassouvisable de phrases déclaratives, de "la vie c'est...", "l'écriture c'est...", "il y a deux catégories de gens dans la vie...", j'ai besoin de vérités, d'aphorismes, je ne demande que ça, que chaque livre soit une bible, je m'y laisse duper, il n'y a qu'en littérature que j'accepte encore les tromperies et les manipulations. "en littérature tout est manipulation", notre professeur de français nous le répétait à longueur de cours.

J'avais trois livres dans mon sac : "petit-déjeuner chez tiffany" dont il fallait que je finisse une des nouvelles, "les mouflettes d'atropos" de chloé delaume, récemment acheté, le début étant incompréhensible, conseillé par A., par tout un tas d'adultes depuis 3 ans, et "la cicatrice" de bruce lowery, lu en 4ème pour l'école, je me souviens en avoir pleuré pour une raison qui n'a rien à voir avec ma jeunesse de l'époque, je suis persuadée que ce livre a vieilli aussi bien que mon esprit critique flambant neuf.

j'ai fini truman capote, j'ai commencé lowery, je crois ne pas mentir en affirmant que je n'ai jamais relu un livre. je pense à julie qui a lu deux trois fois "le parfum" et je pense à moi disant à ma prof de français ou d'anglais "on a beaucoup trop de choses à lire pour se permettre de relire les livres", c'est encore ce que je pense et pourtant plus la vie de lecteur se perpétue plus l'envie d'un retour aux premiers amours se fait sentir. Je pense faire ça dans quelques mois, non, en fait en relisant "la cicatrice" c'est exactement ce que je suis en train de faire.

Il commence à pleuvoir, je suis au bord de la terrasse, au bord de la bâche, ça me mouille un peu, comme quand on marche à proximité d'un arroseur automatique, pas assez pour en recevoir des gouttes, une petite rosée qui fait rigoler, c'est toujours amusant de se mouiller tout en étant habillé sauf quand il s'agit de la pluie, la pluie c'est sérieux : les gens raisonnent comme ça et passe à côté de quelque chose.
Il pleut à côté de moi,
je ne sais pas si vous avez déjà remarqué mais vers le centre pompidou quelque chose se passe au niveau du ciel, l'espace est utilisé de telle sorte que tout à l'air plus vaste, le ciel plus haut, chaque chose est plus impressionnante, l'idée d'une jungle urbaine. ajoutez à ça ce ciel gris gallet ouvert sur du blanc.

ma mère m'avait dit qu'il me fallait des chaussures pour le liban, elle ne veut pas que je prenne une de mes paires de baskets blanches sales, "c'est la honte", moi ça m'énervait de dépenser encore, chaque jour elle se plaint un peu plus des dépenses qu'elle doit faire pour ma soeur, son voyage à new york, son école de conduite, et elle continue pourtant, elle ne se lasse jamais. je lui ai dit sans trop réfléchir, en sachant qu'il n'était pas question de les acheter "j'ai vu une belle paire de springcourt à Châtelet", je n'osais pas lui annoncer qu'elles étaient blanches avec de fines rayures noires verticales, elle m'a demandé "quelle couleur?", comme plusieurs me plaisaient j'ai répondu "oh y'en a plusieurs, des grises, j'hésite, en plus elles sont en soldes", j'avais oublié que les soldes étaient finis, alors en passant près du forum des halles je suis allée voir si les affiches "Soldes" étaient toujours accrochées, ma mère m'a dit "y'aura peut-être pas marqué soldes mais promotion". Les affiches étaient encore là, c'est après que je suis allée au café. j'étais un peu fatiguée, un peu énervée, ça me plaisait bien de m'asseoir, de me reposer, j'avais soif aussi.

Après quand je me suis levée j'étais vraiment en pleine forme, d'attaque pour mes grandes marches, j'avais mon long gilet bleu marine serré entre mes mains, tout était si peu peuplé, dans les rues un vide flagrant, comme une boîte de chocolat presque vide. un choc, et une sensation d'être une rescapée. j'imaginais les parisiens en maillot un peu partout dans le monde, ensuite ils reviennent, ils sont en forme, ils reprennent les vêtements de la ville sur leur peau salée, le réveil, le sandwich du midi, la voix de nicolas demaurand sur france inter qui chaque matin prononce de cette même voix un peu hésitante au moins une fois "nicolas sarkozy", le grand journal, les films à la télé, le changement d'heure, le sommeil, les enfants, le pain de mie, les yaourts, la presse gratuite, les écharpes, le pass navigo, le coiffeur, le dentiste.

vendredi 1 août 2008


en ouvrant la porte de mon immeuble je pensais vraiment que j'étais en train de sortir de chez moi et non pas d'entrer dans un four. Dehors, c'est bien connu, il faut qu'il fasse plus froid qu'à l'intérieur, sinon c'est que quelque chose ne va pas et alors les gens sortent en tong et le bug de l'an 2000 n'est plus très loin. Aujourd'hui j'aurai pu dire "ferme pour aérer" que tout le monde aurait trouvé ça normal, j'ai même été contrainte de sortir une robe, le jean, ce pantalon robuste et normalement bleu qu'on se permet d'associer avec n'importe quelle autre couleur, n'était pas envisageable.
j'aime beaucoup les robes mais sur les autres ou dans les films de rohmer, c'est à dire en mousseline et fleuries avec un petit gilet en laine qui tombe des épaules et que la fille ne réajuste jamais, avec si possible un immonde chouchou et un sac à dos noir pour tout bien harmoniser.

je portais une robe m'arrivant aux genoux (mon petit côté puritain) toute légère d'un beau beige crème, achetée avec ma mère l'année dernière dans un magasin lulu castagnette (oui je sais) en voie de liquidation totale. être dans une robe c'est comme être dans un tuyau de coton, on cherche à ne pas sentir le vêtement, à se sentir nue, ici le petit cordon rassurant qui me serrait la taille était là pour me rappeler que oui j'étais bel et bien habillée. aux pieds des espadrilles couleur jean retourné (c'est précisément ça), la semelle de corde de la même couleur que la robe, la besace upla. c'est la première fois que je me sentais aussi légère dans mes vêtements et je m'en félicitais, pour une fois que je ne faisais pas l'erreur de trop ou de ne pas assez m'habiller.
ensuite c'était parti pour une journée d'activités improvisées, réunir ses forces à celles du pariscope et de la carte imagine-r et voir ce que ça peut donner.

j'ai enfin réussi à m'infiltrer l'exposition richard avedon, il y a tellement de choses à dire que je préfère ne pas commencer, je pourrais résumer mes impressions à un simple "allez-y elle est vraiment bien", ça arrangera tout le monde.
Par contre, pendant l'exposition il y avait un mec, un touriste d'origine asiatique qui portait un t-shirt avec imprimé dessus et prenant la totalité de la place la couverture de l'édition anglaise de "the Catcher in the rye". ça m'a d'abord surpris de voir en lieu et place d'une photo des Clash -par exemple- une couverture de livre. Bon, au début j'ai été contente pour lui puis très vite après l'enthousiasme "oh je viens de trouver un des 50 millions d'amateurs de Salinger", je me suis dit que cette idée de t-shirt était très maladroite et même irritante pour tout lecteur de jérome david car personne n'est digne de suer sur une couverture de Salinger et surtout la littérature ne mérite pas ça. La musique est fédératrice, elle se joue en groupe et devant plusieurs personnes, bon, mais la littérature est quelque chose qui doit rester dans cette optique d'unité, un écrivain pour un livre pour un lecteur, quelque chose d'individuel, de muet (écriture comme lecture) de caché, non pas comme une honte mais comme un délicieux secret, comme de la lingerie, plaisante et fragile, c'est un moment de concentration, de recueillement, pas forcément solennel mais du moins bienfaiteur.
Mais ce t-shirt, je veux dire, qu'est-ce qu'il vient faire là, dans la rue et le métro, en boîte de nuit et aux toilettes, il ne rime à rien, il est hors sujet, c'est jeff koons à Versailles, et puis salinger qui avait atteint le degré ultime de la discrétion, il va en dire quoi? Et puis, imaginez écrit sur votre poitrine "l'insoutenable légèreté de l'être", ou encore "je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part", "l'idiot", "demande à la poussière", "où-es tu?", "j'ai quinze ans et je ne veux pas mourir,"moi christiane F."... bon c'est sans fin, c'est amusant à imaginer mais juste à imaginer. A force de trop vouloir en révéler sur ses goûts et de prendre de l'avance sur ce qu'on aurait su au moyen de questions on finira par ne plus avoir de mystères pour personne. et le mystère c'est l'amour.
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Les livres se débrouillent pour nous rendre la tâche qui consiste à parler d'eux à quelqu'un la plus dure possible, il est difficile de parler d'un bouquin précis -un peu moins d'un écrivain et de son oeuvre- sans tomber dans des platitudes et des insignifiances, alors autant ne rien dire et travailler sur une liste, la plus précise possible, de ses écrivains préférés, c'est selon moi le moyen le plus simple et efficace de communiquer à autrui ses goûts et ce qu'on recherche en matière de littérature, si la personne est sensible aux mêmes choses que vous alors elle en saura les raisons et alors vous pourrez commencer sur de bonnes bases votre idylle.
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Quand une personne me dit "je viens de lire ceci" ou "celui là je l'ai lu" -parfois ce sont des lectures que je ne lui soupçonnais pas et alors là c'est encore mieux- je me plais à l'imaginer au fond de son lit à tourner les pages, à finir le livre et à le poser à côté d'elle, et ce qui se passe à l'intérieur de cette personne pendant cette lecture d'apparence sérieuse et régulière, personne ne le saura, et tout est ici, la lecture c'est un sachet de thé qui infuse dans le silence. Je pense qu'il est facile de tomber amoureux d'une personne qui lit, comme d'une personne qui dort, parce qu'il y a ce côté insondable, cette impossibilité à capter l'attention de la personne, à s'interposer entre elle et son livre, elle et l'intérieur de ses paupières. la télé : on l'éteint, la fenêtre : on en tire les rideaux, mais le livre lui, est entre les mains du lecteur et ses paupières reliées à sa peau. Alors on préfère le regarder faire et le protéger de la tendresse soudaine qu'il nous inspire.