dimanche 14 août 2011

Cher Roman,

j'avoue je ne m'attendais pas à ce que tu m'écrives un message aussi gentil que celui que j'ai reçu de ta part, tu imagines bien quel genre de joie il y a à consulter une fois tous les deux ou trois jours sa messagerie sans espoir, d’avoir l’impression que l’on approche en août le vrai état des choses où tout le monde est rivé à sa vie, à ses vacances, et où l'on est forcé à la solitude et à l'hébétude par le seul fait qu'aucune contrainte ne nous oblige à côtoyer les autres, et de tomber sur un mail inattendu, bienveillant, bien amical. Je t'imagine à Venise et me demande quel genre de touriste tu es, je t'imagine fatigué par le repos et le temps libre comme je l'aurais été moi-même. Je trouve trop dur d’essayer de s’élever au-delà de la condition touristique, je me retrouve vite fatiguée et finit par tomber sur ma propre incuriosité et mon indifférence. Tout m‘embête et si j‘entrevois le début d’un folklore vécu quotidiennement je m‘attriste de ne pas pouvoir plus, d‘être sans cesse projetée en arrière par la force centrifuge du quotidien des autres, condamné à ne rien comprendre de l'intérieur. Et c'est comme si je ne voyais aucune alternative au voyage triste, alors si tu en as une raconte moi tout.
Tu as tout à fait raison de me dire que je devrais aller lire au café et je suis aussi persuadée que toi que c'est la meilleure chose à faire. Au fond je n‘aspire qu‘à ça et le voyage, s‘il possède une acception idéale, ne veut à peu prés dire que ceci : s‘asseoir dans un café. Ici aussi au Liban je ne demande qu'à reconstruire ce rituel autiste au monde, comme je suis souvent prise dans des cercles, des groupes, la famille et son tumulte c’est important de travailler à reconstituer cet espace avec une tasse de thé, mes deux biscuits (ok parfois cinq), et un livre. Ce n'est pas tant pour boire mon thé (Lipton jaune de base) que pour affirmer quelque chose, mais j'ignore encore quoi, essayons: quelque chose qui rassurerait comme si je prenais profondément racine en un point précis, en un lieu, et mettais en scène mon individualité par le soudain besoin d'un certain rituel et l'unité de chaque objet : une tasse, un livre, un sucre : j‘existe bien.

Je ne sais pas comment t'expliquer qu'il est presque tout à fait impossible pour moi d'être une promeneuse au Liban comme tu peux l‘être à Venise. Une marcheuse qui introduit un peu de distance entre elle et ses mauvaises vacances en faisant une de ces promenades qui nous ancre progressivement dans le monde. Leur plaisir est à la fois extrêmement dépendant du lieu où l'on se trouve et à la fois déclinable dans n'importe quel coin du monde, comme si l'esprit, à force de marcher finissait d'atteindre toujours ce même point universel de la pensée, comme si la marche physique avait sans crier gare parcouru une distance toute spirituelle. Ici la marche existe difficilement : les voitures sont reines, il n'y a pas de trottoir, pas de feux tricolores, conduire et marcher y sont dangereux mais les libanais ont développé un tel point de folie et de vigilance dans leur conduite qu‘une forme de normalité folle s‘est rétablie. Les routes sont extrêmement pentues et entre deux immeubles il n‘y a souvent rien que du bitume, souvent tu prends le risque de tomber dans le fossé à cause d’un énorme camion.
Au mieux on peut se balader dans la capitale, Beyrouth, entièrement reconstruite et dont la splendeur de plastoc mondialisé-arabisante te donnerait la nausée. Le Hard Rock Café côtoie le Virgin Megastore, un peu plus loin, une énorme mosquée jouxte une église et des vestiges archéologiques fraîchement retrouvés. Sauf que pour s'y rendre il faut bien trente minutes de voiture et même la ville n'ouvre ses possibles qu'aux privilégiés, les palaces règnent tranquillement sur la ville et si tu marches assez longtemps tu es vite accosté par des femmes pauvres qui te demandent si tu n'as pas quelque chose pour leur fils et même si tu n'as rien, même si tu les ignores, elles te quittent en te disant "Que Dieu te bénisse" avec cet air qui te fait penser qu’elles viennent de te maudire; les libanais sont très superstitieux. A Beyrouth, si tu es un piéton tu finis dans une rue piétonne que l’on n’atteint jamais à force de marche et de hasard mais parce qu' il n’y a rien d’autres. Le pays n’existe que par bouffées de construction, ici un supermarché à coté d’un immeuble, ensuite rien que des poteaux électriques et puis encore deux immeubles, plus loin, un supermarché. Bien sûr je te raconte ça en espérant que tu me connaisses assez pour savoir que je colore de mon insatisfaction tout ce qui me tombe sous les yeux. Dans « Des mots de minuit » spécial Beyrouth des architectes discutaient de la laideur et de l’incohérence de la ville mais Le Clézio s’émerveillait de voir Beyrouth ne jamais dormir, je ne vois pas en quoi cela en fait forcément un bon point. Ça devient profondément pesant de n’entendre plus que ce vocabulaire de « ville qui ne dort jamais » pour justifier de l’intérêt d’une ville comme si nous pouvions l’expérimenter dans un plan d’ensemble euphorisant qui nous ferait vivre à la fois LA nuit et LA ville, comme si ça voulait dire autre chose que « les night-clubs et leur ennui sont ouverts, des idiots alcoolisés n'ont rien à vous raconter » .
Tu me demandes si une fille ne peut pas se promener seule, en fait le problème, après celui de l'impossible marche, est tout autre : ici l'unité la plus élémentaire c'est le groupe. L'observation de l'agencement des cafés suffit à le constater, ce sont des longues bandes de tables, il y a cinq à huit chaises autour, tu fais d'énormes commandes, tu demandes à fumer le narguilé, tu parles tu parles, tu manges des cacahuètes, des pistaches, des noix de cajou. Depuis que je viens ici en été je ne vois que rarement des hommes attablés seuls avec leur téléphone posé devant eux comme une ouverture sur de possibles présences. Je n‘y croise jamais cette façon d‘être seul au café qui ne cherche rien d‘autre qu‘à atteindre une forme pure du présent et du regard sur la ville. A l’inverse, un guéridon de café parisien semble n'inviter qu'à l’émergence d’une solitude guillerette. Tu marches dans la ville et tu finis par te glisser avec fluidité entre le guéridon et sa chaise et ce n'est que difficilement et en embêtant le serveur que l'on s'attable à cinq. Souviens toi de la dernière fois avec Juliette et Thomas, on se sentait en train de bousculer un ordre établi : deux chaises pour une table. L'espace restreint et le voisin que tu gênes te le font bien comprendre. La tradition ici ce sont les grands restaurants perchés dans la montagne où tu commandes une table pour vingt personnes et où tu picores des mezzes.
J'y suis allée il y a juste deux jours : deux heures de trajet pour l'aller et une journée qui passe sans que tu aies fait autre chose que manger et insulter tout le monde dans la voiture; c'était tellement la merde que j'ai fini par passer une bonne journée. Donc pas de flânerie, mais des groupes et des voitures, s'il y a une culture de la solitude et de la rêverie solitaire elle n'existe que contre cette culture de groupe et n‘existe pas du tout en tant que besoin d'être seul à renouveler.
Ma cousine plus jeune que moi de deux ans est en train de passer son permis, et hier je me disais, en pensant à mes amis de licence, qu'ici au Liban ce droit à la nonchalance on ne peut pas se la permettre : travailler mal, dire non au permis de conduire, faire des sciences humaines, ne pas se marier, ce n'est pas envisageable ou alors c’est vivre dans une marge qui n’est même pas souhaitable pour soi-même, autant voyager pour aller vivre ailleurs. Parfois j'ai tendrement honte pour toutes les libertés que l'on prend quand je regarde la vie réglée et éminemment familiale de mes cousines. Je pourrais facilement me moquer d’elles, écouter cette petite cellule en moi qui s'exclame "pour rien au monde autre chose que ma vie" mais la question bien sûr, ne se pose pas en ces termes et il faut alors se faire violence pour ne pas succomber à la comparaison de tout avec n'importe quoi, car nos modes de vie n’ont rien de comparables, ils sont aveugles et sourds l’un pour l'autre et autant justifiés l'un que l'autre.
Quand je suis au Liban, mon mode de vie français me paraît presque irréel, en France, si je pense au Liban je me dis qu‘il est un point depuis lequel on me juge. Leur vie est une autre sorte de sagesse, la sagesse de se dire qu'il n'y a rien de bon à aller titiller les excès, les cimes du désespoir, les subtilités de dosage de la tristesse, les artifices de la solitude, cette façon que l‘on a de vivre en imposant si naturellement son individualité, ses exigences et ses cris. Ici on préfère passer des journées avec sa famille, discuter avec sa grand-mère, parler toute une soirée avec sa mère, regarder la télé avec sa sœur. Il y a un filet de sécurité et de socialité empêchant que les pensées n'aillent se perdre trop loin, dans cette angoisse sans forme, ces hoquets de narcissisme et d'ambition qui nous chauffent le cerveau, ses balbutiements de révolte, de cynisme, de haine qui sont notre quotidien - je dis ça en me rendant compte de ce qu‘il y a de profondément passionnant à vivre comme ceci et je pense aux amis de la licence, a la façon dont ils imposent chacun leur monde. Ici tout le monde tend à se fondre dans le cosmos, comme ces petites maisons qui semblent être disposées comme si une main divine les avait saupoudrées sur les collines du Liban. Cela me rappelle cette phrase de Virginia Woolf qu’elle écrit dans son journal à propos de son homme, et dont je ne garde que le goût et jamais les mots exacts, heureusement je l'ai notée dans mon agenda alors je peux te la répéter "ma personnalité semble résonner au loin dans l'espace lorsque L. n’est pas là pour en enclore toutes les vibrations". Et cette autre phrase de Woolf dans Voyage au phare "Le repos, d'après son expérience, jamais on ne le trouvait en tant qu'individualité, mais en tant que coin de ténèbres. En abandonnant sa personnalité on abandonnait l'inquiétude, la hâte, l'agitation. » Ici se poser en tant que coin de ténèbres est difficile, et le repos s’exerce en famille qui a cette vertu lumineuse de te divertir de ces problèmes existentiels qui semblent, à l'inverse des soucis quotidiens, descendre sur nous depuis l'espace infini. Le foyer est cet espace clos imperméable à ces vibrations glacées. J’avoue parfois éprouver ce réconfort en rentrant chez moi après une soirée déprimante, parce que ma mère est en train de cuisiner et que sa simple ignorance de mes problèmes me fait dire que je n'en ai peut-être pas.
Je t'imagine bien marcher les mains dans les poches et lire au café, c'est une vision plutôt rassurante, comme de penser à Juliette en train de travailler ou à Thomas avec son sac à dos en Thaïlande, nous sommes reliés les uns aux autres par un fil d'une couleur insoupçonnée, dans bientôt un mois, peu importe la façon dont nous avons passé nos vacances, nous partagerons de nouveau un même mode d'existence. Vision rassurante aussi parce que j'ai l'impression que tu fais souvent ce que tu veux dans ta vie, que tes désirs se frayent une place dans le monde, que cela est pour toi tout à fait la moindre des choses et que tu vis proprement, sérieusement et calmement. Je suis aussi comme toi, je n’ai pas à me plaindre d’un trop fort décalage entre ce que je vise et ce que j’atteins, mais j‘ai l‘impression de devoir me battre contre un danger qui sont les forces obscures des mœurs libanaises. De façon plus large je crois que nous nous débattons tous contre cette version de notre vie qui semble courir après nous à pas feutrés et où nous serions bourgeoisement installés dans la vie en y menant une existence d‘un « désespoir tranquille », comme dirait Thoreau. Il est juste et justifié pour nous de chercher à vivre comme personne même si les formes que cela prend chez certains me crispent au plus haut point. Il est tout aussi juste pour les jeunes libanais de chercher l‘inestimable réconfort de la conformité. Cette conformité chaude et qui pourtant symbolise chez nous le piège sur lequel on tombe à force d’essayer de s’en détourner. Je crois que je reste encore confortablement prisonnière de cette énorme tentacule qui s'appelle famille, qui plus est libanaise, alors que beaucoup d'entre vous à la fac, vous semblez ne plus connaître ça que dans les moments où cela s'impose obligatoirement à vous. Vous avez cette intelligence du détachement que je ne pourrais pas essayer de singer sans sentir que je fais fausse route, que cela n‘est pas moi. Ma vie est telle que je ne peux échapper à une discussion avec ma sœur, à des blagues avec mon frère, à une casserole de riz préparée par ma mère. Ma famille épie beaucoup ma façon de travailler à mon autonomie.
Ici à l’hôtel j'avoue vivre dans un vacarme perpétuel à peu prés toute la journée, le matin Chris mon cousin et Emile (il va avoir 15 ans, il est très mignon même avec de l‘acné) crient, se battent juste à coté de moi, à même mon lit qui se trouve à coté du salon, dans un espace ouvert. Ensuite je prends mon café en regardant la télé avec eux, aujourd'hui j'ai fermé le rideau et j'ai pu aller fumer sur la terrasse avec mon café, j'ai regardé le paysage en tentant d'éprouver quelque chose comme un vertige mais j'ai fini par me dire que je ne savais pas ce qu'était la nature (j’aime bien me poser des questions sur les définitions rudimentaires comme on t’apprend en cours de philo de terminale) et je suis descendue à la piscine.
Ce vacarme ne me dérange pas parce qu'il est très peu présent quand je suis à Paris. Je laisse ici ce vacarme m'envahir tout à fait pour qu'il me rappelle la valeur de son exact contraire, le calme des lectures, les cinémas, les discussions avec les amis, le silence des soirées sans télévision. Depuis que les cours de la fac se sont terminés je n'ai jamais autant parler à ma sœur, à mon frère et à ma mère. En pensant pouvoir trouver du temps pour mes choses à moi pendant ces vacances c'est en fait eux que j'ai trouvé tout au bout. Et ce que je me dis ce n’est pas « j’ai perdu mon temps à discuter à propos de rien et à faire des blagues» mais « ceci est plus que le reste la vie ».
Ici ce que j’aime faire le plus c’est aller me baigner un peu et puis me sécher au soleil. J’ai l’impression d’être une ville après la pluie qui se sèche imperceptiblement au soleil revenu, peut-être alors qu’un arc-en-ciel traverse mon corps, en tout cas je me sens mêlée aux éléments, tout devient alors très concret : le soleil, l’eau et ma peau. Je pense à ce que deviendra cette goutte sur mon bras, le plus souvent elle glisse à l’horizontal et finit par s’écraser sur la serviette; quand je suis tout à fait sèche alors je peux ressortir mon livre.
Ce n’est pas sans intérêt de vivre dans le microcosme d’une piscine et de ses transats, voir à quel point il devient normal de marcher toute trempée, les jambes découvertes, devant des familles inconnues, voir des femmes qui regardent comme des parties tout à fait indépendantes d’elles-mêmes, leur ventre, leur bras, leurs cuisses cuire dans leur huile solaire : la peau reprend ses droits. Là aussi je ne peux m’empêcher de comparer. La peau à Paris se révèle dans ses scintillements, elle est un espace d'imaginaire et de tremblement, elle est une question posée à notre monde qui est un monde recouvert, l'exhiber plus qu’il ne le faut c'est faire fausse route, être dans l'erreur. J’aime que la ville soit pudique autant qu’elle le peut, mais d’une pudeur non pathologique mais qui serait une des ramifications que prend la politesse et l’élégance. Ici autour de la piscine, la peau exhibée est pure matière, présence sans issue et qui perd son ambiguïté. Par exemple la peau des bras de mon prof de philo de terminale s’offrait banalement à moi au café en été, c’était pourtant la première fois que je les voyais et ils devenaient de se fait comme une sorte de sommet d’érotisme…sentant l’obscénité d’une telle vision mon prof a très vite fait de redescendre les manches de son polo. Cette scène serait impossible ici. J'ai vu les cuisses banales de femmes qui n'étaient rien pour moi, j'avoue donc être d'abord tout à fait opposée au concept de maillot de bain et finir par jouer le jeu parce qu’il faut bien barboter dans la piscine. J’aime l'idée que les corps qui se montrent à nous soient des corps aimés et qu'ils se dérobent sévèrement aux regards qui pourraient leur témoigner de l'indifférence. J’aime que tout ce qui puisse s‘éprouver à propos d‘une peau ne soit l‘objet que d‘un esprit pathologiquement rêveur qui se suffit d‘un poignée, d‘une clavicule. Montrer son corps est un don inutile, que personne n'exige mais que le regard ne peut s'empêcher d'accepter comme magnétiquement attiré vers lui. Comme l’érotisme lourd d’un décolleté trop généreux qui ne nous offre aucune issue vers un sens différent de celui de la concupiscence. Ceci est précisément le vulgaire : la clôture du sens, la matérialité étouffante.

Si tu veux j’ai un bon truc ici pour abîmer mes livres sans délai : ils se prennent souvent de l’eau de piscine et des pages deviennent un peu craquantes comme des feuilles. J’ai un recueil de romans de Virginia Woolf qui a pris la pluie à Paris, il pleuvait tellement que l’eau était entrée dans mon sac, je m’étais promis de ne jamais abîmer ce recueil, j’adore son papier, son odeur et l’épaisseur du volume, j’ai été traumatisée quelques minutes mais ça finit par passer, on se désintéresse de ce genre de faux problèmes. J’avais trouvé « Paris est une fête » décevant, presque anodin, je lui préfère « Satori à Paris », beaucoup plus bref, Kerouac part à la recherche de ses origines françaises, je te le conseille malgré la couverture dégueulasse de l'édition Folio comme le sont la plupart de leurs nouvelles couvertures. Perso je lis « Lolita » que je n’ai jamais lu, je trouve que j’ai bien fait de négliger cette lecture pour ne la lire que maintenant, à un moment où je pense qu’elle s’offre à moi dans tout son potentiel, résonne dans sa totalité et non pas partiellement faute d'expérience ou de je ne sais quoi. Je trouve qu’il y a deux mémoires des livres et des films : une mémoire rationnelle qui se souvient de certains passages, de certaines phrases, de situations précises et des raisons pour lesquelles l‘œuvre est réussie, et puis la mémoire émotionnelle, proche du stade de l’oubli, où tout n’est que bouffées de couleurs, d’impressions et d’atmosphère, des choses tout à fait incommunicables, la mémoire des lectures d’enfance est principalement celle-ci et peut-être que les livres de notre enfance ne sont bons qu'à condition d'être saisis par le filtre de cette mémoire.
Ici il est deux heures du matin et il y a la rediffusion de « Comme si c’était hier » : des célébrités sont plongées dans le job qu’elles faisaient plus jeunes ou que leurs parents pratiquaient, là il y a une ancienne Miss France qui fait l’infirmière, je sais pas pourquoi mais cette émission est, depuis mon séjour, l’une de mes préférées à tous les niveaux, elle me nourrit comme spectatrice lambda autant que comme spectatrice critique: les « situations humaines » que l'émission s’efforce de provoquer finissent par vraiment marcher avec ceci de bancal que tout est prévu mais qu‘il reste une zone d‘impensé et d‘imprévisible qui fait émerger des choses un peu plus sales et intéressantes, des rapports de force où la célébrité aimerait crier "mec je suis une star, pas ton employée" ou cette façon qu'elles ont d'attendre d'être reconnues par les clients. J’admire aussi le zèle et l’assurance des célébrités qui osent tout sans se poser de questions, qui ont cette intelligence de l'action, cette idiotie de l'action. Il s’y joue aussi un subtil renversement qui fait que les célébrités se trouvent soudainement écrasées, ridiculisées et conscientes de l'être par des gens qui exercent de vrais métiers. Ceci est bien sûr d'un intérêt tout relatif et qui doit beaucoup à mon ennui.

Demain lundi au Liban c’est la Sainte-Marie, c’est une fête religieuse importante tu sais, tu fais des feux d’artifice dans ton balcon et tu vas à l’église et tout. Je rentre jeudi matin, et j’avoue c’est vrai que tu as quelque chose du Tadzio de « Mort à Venise » mais cette remarque a quelque chose de trop flatteur que je n’assume qu’à moitié. Vivement septembre, ces vacances sont interminables comme cette carte postale, et j'ai aussi besoin qu'un chargé de TD me corrige mes raisonnements.

Bisou,
MURIELLE

3 commentaires:

Charles Girard a dit…

Belle gosse, 20 bisous / 20

Anonyme a dit…

C'est curieux comme vous vous déplacez toujours à partir d'un point d'immobilité. Comme si vous restiez sur place dans la marche même. Et que vos qualités d'observatrices qui sont très pointues vous obligeaient à figer le monde pour n'en rien perdre.
On dirait que vous ne voulez jamais rien oublier.

Sinon, Stendhal a écrit qu'un roman est comme un miroir promené le long d'un chemin.

ashorlivs a dit…

Avant c'était des Tranches, maintenant c'est des Tartines, bisous